Master or citizen?: Political ontology of self-building in a precarious housing neighborhood in Rio de Janeiro
Maître ou citoyen ? Ontologie politique de l’autoconstruction dans un quartier d’habitat précaire de Rio de Janeiro
Cet article explore le sens politique de l’autoconstruction dans un quartier d’habitat précaire à Rio de Janeiro. Fondé sur vingt mois d’enquête ethnographique dans le « lotissement irrégulier » du Jardim Maravilha, il remet en question l’interprétation dominante des citizenship et infrastructures studies, qui associe l’autoconstruction à une forme de « citoyenneté infrastructurelle » ou de résistance contre l’ordre hégémonique urbain. En effet, les habitants qui pratiquent l’autoconstruction ne se considèrent pas toujours comme des « ci-toyens revendicatifs », mais se pensent plutôt comme des « maîtres » qui défendent leur autonomie et cherchent à contrôler leur environnement sociomatériel. L’article distingue entre, d’un côté, « l’ontologie progressiste » des recherches qui insistent sur la lutte pour l’égalité, la participation civique et la reconnaissance, et, de l’autre, « l’ontologie domestique » – ou oikonomia – des habitants qui interprètent le monde à partir de leur expérience quotidienne. L’article montre comment cette ontologie structure les rapports au droit, aux infrastructures et aux institutions locales, révélant une relation opportuniste à la légalité, mais aussi des formes spécifiques de mobili-sation collective, fondée sur l’interdépendance des maisonnées. Ces rapports s’enracinent dans une histoire sociale et environnementale spécifique, marquée par l’expérience de la frontière et la menace du cativeiro, de la perte d’autonomie domestique. Face aux limites des politiques de participation citoyenne, l’article souligne la nécessité d’analyser les marges urbaines à travers le prisme de l’autonomie domestique, plutôt que de présuppo-ser un engagement citoyen conforme aux cadres progressistes.
Mots-clés
- autoconstruction
- progressisme
- maison
- frontière
- entraide